IST : on se protège aussi en vacances !

Soleil, amour d’été… et risques sous la couette ! Sans protection, les IST comme le VIH ou la chlamydiose guettent. Voici comment s’en prémunir et quand se faire dépister.

Par Eva Mattei, Vanessa Pageot
Publié le 2 juin 2025 à 15:34, modifié le 9 juin 2025 à 15:59
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L’été, pas de vacances pour les IST !

Pour Zélie, 18 ans, étudiante en Occitanie, pas question d’entamer une nouvelle relation sans se protéger, grandes vacances ou pas. « Je ne prends pas plus de risques l’été que pendant les autres périodes de l’année », confie-t-elle.

Mais tous les jeunes ne sont pas aussi responsables. « L’été, les prises de risque sont en hausse, avec des situations plus festives, un risque de consommation d’alcool et d’autres produits », constate la docteure Radia Djebbar, clinicienne et coordinatrice référente à Sida Info Service (SIS-Association). « D’ailleurs, nous remarquons un afflux de personnes pour les dépistages pendant cette saison », ajoute-t- elle.

Au-delà de cette période estivale, autorités sanitaires, associations et professionnels de santé constatent une augmentation des infections sexuellement transmissibles (IST) en France. Entre 2020 et 2022, Santé publique France a ainsi observé une hausse de 16 % de cas de chlamydiose (102 cas pour 100 000 habitants), de 91 % de cas de gonorrhée (44 cas pour 100 000) et de 110 % de syphilis (21 cas pour 100 000). « L’augmentation des IST, on la ressent, ne serait-ce que par le nombre d’appels, pour toutes les infections, compris le VIH et l’hépatite B. Les questions sont surtout relatives à des prises de risque », rapporte la docteure Djebbar. 

Mais qu’entend-on par IST, exactement ? Le terme de « maladies sexuellement transmissibles (MST) » a longtemps été utilisé, mais on lui préfère aujourd’hui celui d’« infections sexuellement transmissibles (IST) », jugé plus pertinent.

Dans un premier temps, les symptômes restent généralement imperceptibles. Les IST peuvent être d’origine virale, comme les papillomavirus humains (HPV), l’hépatite B, l’herpès génital ou le VIH ; bactérienne, avec des agents tels que syphilis, gonorrhée, chlamydiose ou Mycoplasma genitalium ; ou parasitaire, comme dans le cas des morpions (phtiriase), de la gale ou de la trichomonase. 

Idées reçues chez les jeunes 

« Il y a un manque d’informations sur les infections sexuellement transmissibles et un risque de relations sans préservatif, sans compter les fausses croyances qui circulent, comme la contraception qui protégerait des IST, alors que c’est complètement faux ! », souligne le docteur Michel Sala, vice-président du Syndicat national des médecins biologistes (SNMB).

Le constat est le même chez les pharmaciens. « Les jeunes se sentent invulnérables. Le sida ? Ça ne leur fait pas peur », observe Pierre-Olivier Variot, président de l’Union de syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo).

Alexis, 23 ans, francilien, est très prudent quand il évoque ses connaissances sur les IST : « Je sais qu’il y a l’hépatite B et le sida, et qu’il faut se protéger, mais c’est vrai que c’est un sujet qu’on ne voit pas dans les médias et on n’en parle pas non plus entre potes », explique-t-il. Zélie, elle, est bien sensibilisée aux IST, à leur mode de transmission et aux moyens de protection. « Je suis vaccinée contre le HPV et je me souviens de la séance sur l’éducation à la vie affective et sexuelle au collège et au lycée. Mais, surtout, ma mère est infirmière, alors j’ai toutes les informations… »

La vaccination contre les papillomavirus humains est recommandée pour tous entre 11 et 14 ans, et jusqu’à 19 ans en rattrapage. Elle permet de se protéger contre 90 % des HPV (il en existe une quarantaine qui contaminent les muqueuses sexuelles) « si le vaccin est effectué avant les premières relations sexuelles ou dans les premières années qui suivent le début de l’activité sexuelle », précise la docteure Djebbar. D’autant plus que certaines souches de HPV sont responsables de 100 % des cancers du col de l’utérus. L’autre IST pour laquelle il existe un vaccin préventif efficace, c’est l’hépatite B. Pour toutes les autres, se protéger passe par l’utilisation du préservatif. 

« Les jeunes se sentent invulnérables. Le sida ? Ça ne leur fait pas peur. »

Gratuité pour les moins de 26 ans 

Si le préservatif est le moyen incontournable pour se protéger des IST, il n’a pas la cote auprès des jeunes, regrettent les professionnels de santé. Ce que souligne un récent rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), publié fin août 2024 : « 30 % des jeunes ont déclaré n’avoir utilisé ni préservatif ni pilule contraceptive lors de leur dernier rapport sexuel. » Plus inquiétant, « entre 2014 et 2022, la proportion d’adolescents sexuellement actifs ayant utilisé un préservatif lors de leur dernier rapport est passée de 70 % à 61 % chez les garçons et de 63 % à 57 % chez les filles ».

En France, depuis le 1er janvier 2023, les préservatifs sont gratuits en pharmacie et accessibles sans ordonnance pour tous les jeunes de moins de 26 ans. Un dispositif encore peu connu. « On en dispense peu », remarque Pierre-Olivier Variot. En cause, « la concurrence des préservatifs de marque avec des caractéristiques recherchées (très fins, sans latex) ou ludiques, avec une texture ou un goût particulier », analyse-t-il. Le pharmacien en profite pour évoquer un point essentiel : le mode d’emploi du préservatif. « Il est nécessaire de pincer le réservoir en le mettant. Mais combien le font ? » En cas d’oubli, le préservatif peut se déchirer dans neuf cas sur dix. « C’est dommage car quand on fait la démarche de se protéger, autant le faire bien, souligne Pierre-Olivier Variot. Selon Confucius, une petite impatience peut ruiner un grand projet. » 

Le préservatif au féminin 

Le préservatif masculin n’est pas le seul moyen de protection efficace contre les IST : sa version féminine l’est tout autant. Sauf que cette dernière est encore confidentielle. « C’est un bon moyen pour que la femme soit sûre à 100 % d’être protégée », relève la docteure Djebbar. On peut le trouver gratuitement dans les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) et auprès d’associations de lutte contre le VIH et les hépatites. Sinon, le principal inconvénient du condom féminin est son prix : sur Internet, il est vendu entre 2 et 3 euros l’unité. Les associations et les pharmaciens militent pour une prise en charge à 100 % de cette protection pour les jeunes.

Si le préservatif féminin est très peu connu, la digue l’est encore moins. Il s’agit d’un petit carré de latex à poser sur la vulve ou l’anus lors d’un rapport oral. « On peut également découper un préservatif en deux, cela est aussi efficace », annonce la docteure Djebbar. Se protéger dans ce cas est important car « certaines IST (comme les infections à Chlamydia, à papillomavirus ou l’herpès) peuvent se transmettre lors de caresses sexuelles, par échange de fluides sexuels ou par contact direct avec des lésions ou des muqueuses infectées », précise-t-on sur le site Question Sexualité

« Qui dit sexe dit test » 

La majorité des IST sont asymptomatiques. Cela signifie que l’on ne présente ni signe de maladie ni symptôme en étant infecté. Le risque est de transmettre l’infection à son partenaire sans être au courant et de développer des complications tardivement.

La seule façon de savoir si on est porteur d’une infection est le dépistage, car « qui dit sexe dit test », rappelle le slogan du programme « Mon test IST ». Celui-ci a été mis en place le 1er septembre 2024 dans tous les laboratoires d’analyses médicales de France. Il permet de dépister chlamydiose, gonorrhée, syphilis et hépatite B (en plus du dépistage du VIH mis en place le 1er janvier 2022).

Le dépistage de ces IST se fait sans ordonnance, il est pris en charge à 100 % pour les moins de 26 ans et à 60 % pour le reste de la population (les 40 % restants étant pris en charge par la mutuelle). « Je me souviens très bien de la date du 1er septembre 2024 car nous avons reçu de nombreux jeunes venus se faire dépister dès le premier jour du programme, témoigne le docteur Sala. Nous avons tous été surpris du succès. »

L’avantage du dépistage des IST dans un laboratoire sans prescription médicale est son accessibilité. « Tout le monde peut se rendre dans un labo en bas de chez soi », ajoute le médecin biologiste. En couple depuis un peu plus d’un mois en avril dernier, Alexis doit justement prendre rendez-vous pour se faire tester. Sa copine, elle, a déjà fait le test dans un CeGIDD. 

Dépistage : quand et comment ? 

Les dépistages des IST peuvent donc se dérouler dans un CeGIDD, avec ou sans rendez-vous. Il suffit de se présenter avec sa carte Vitale et sa carte de mutuelle pour les plus de 26 ans. Pas besoin d’être à jeun ni d’apporter un document en particulier.

Un infirmier reçoit la personne pour une prise de sang et lui propose un ou plusieurs autoprélèvements. Ces derniers sont simples, rapides et indolores. Pour dépister le VIH, la syphilis et l’hépatite B en laboratoire, une prise de sang est nécessaire. Il existe des tests rapides d’orientation diagnostique (TROD) disponibles dans les CeGIDD et auprès d’associations de lutte contre le VIH et les hépatites. Une simple piqûre au bout du doigt suffit, avec un résultat en quelques minutes. Le principe est le même pour les autotests VIH vendus librement en pharmacie et distribués gratuitement par les associations de lutte contre le sida.

Pour certaines infections sexuellement transmissibles (chlamydiose et gonorrhée, par exemple), un frottis doit être pratiqué pour la femme et un prélèvement urinaire pour l’homme. Enfin, « contrairement aux idées reçues, certaines communautés se font plus dépister que d’autres, relève le docteur Djebbar. C’est le cas de la communauté gay, sensibilisée aux IST et qui se fait dépister régulièrement ». 

Dernières recommandations

Quoi qu’il en soit, il est préconisé de faire des tests à chaque changement de partenaire. « Si la relation est durable, les deux partenaires peuvent utiliser un préservatif et se faire dépister six semaines après le début de leur relation. Une fois les résultats reçus, ils n’auront plus besoin du préservatif », indique le docteur Sala. La Haute Autorité de santé (HAS), elle, invite à faire un dépistage « au moins une fois dans sa vie », même si l’on n’a jamais changé de partenaire, la vie réservant parfois des surprises…